La fermeture résidentielle: Recompositions urbaines, pratiques et représentations.

Ce blog a pour finalité de présenter mes travaux de recherche et leur avancement au fil des trois années de thèse au sein du laboratoire ART-Dév de l'Université Montpellier III.

Cassandre DEWINTRE, Monitrice allocataire MENRT, Université Montpellier III

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vendredi 6 septembre 2013

Dernier article en date: « Les villes à l’épreuve de la fermeture résidentielle : Des territoires fragmentés face à l'enjeu de la durabilité »

« Les villes à l’épreuve de la fermeture résidentielle : Des territoires fragmentés face à l'enjeu de la durabilité »                                                                                           -  Cassandre DEWINTRE -
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             Introduction

- La multiplication des ensembles résidentiels fermés et sécurisés, en lien avec les dynamiques de métropolisation dans un contexte de renforcement de la mondialisation, a été largement analysée comme une manifestation de fragmentation urbaine, voire, dans les cas les plus extrêmes, de sécession. Elle est révélatrice, dans les espaces qui ont été les premiers marqués par cette dynamique, d’une tendance forte des classes supérieures, voire des classes moyennes, à se démarquer du reste de la société ainsi que « des principes communs de gestion de l’agglomération » pour former une enclave sécurisée, fondée sur une recherche de d’«entre-soi » et d’affinités de style de vie (gated communities)[1]. Ce phénomène a été analysé comme un risque d’éclatement spatial s’accompagnant d’une perte de cohésion sociale et urbaine, comme une menace pour la ville prédite à « devenir, à terme, une somme de territoires à forte connotation identitaire, désengagés de toute référence globale »[2], dans des contextes où la pauvreté et les écarts sociaux vont en s’accroissant.

- Que ce soit la volonté d’entre soi, d’autonomie, de sécurité ou tout simplement de  bien-être, les trajectoires des populations sont diverses et variées et impliquent l’étude systématique de chaque territoire touché par le phénomène. Enjeu social et culturel en premier lieu à travers le risque de désaffiliation sociale, et, du point de vue des pratiques et des représentations, d’une perte d’urbanité entendue comme «mode d’être à la ville, comme système de représentation et comme construction collective qui rend possible la convivialité entre différents groupes, entre différentes populations usant d’espaces communs»[3] et donc publics. Enjeu urbain et politique en second lieu. En effet, la réduction des espaces publics au profit des espaces privés, les entraves à la circulation des individus ainsi que la gestion de ces espaces fermés interrogent la gestion publique de la ville. A l’échelle métropolitaine, la question se pose aussi de la «disparition d'un système de fonctionnement, de régulation et de représentation»[4] face au risque de sécession urbaine.
               
- La multiplication des fermetures résidentielles et leur expansion dans des villes du « Nord » comme du « Sud », grandes ou moyennes, font de cette question un enjeu crucial de société. Il existe en effet une forte demande sociale au sein des collectivités locales pour une meilleure connaissance de ces territoires fermés, généralement mal connus et abordés à travers la littérature sur les villes américaines ou latino-américaines. Dans quelle mesure cette dynamique fait-elle peser un risque de fragmentation sociale aux villes ? Prend-elle son sens dans une recherche de sécurisation de l’espace et de distanciation sociale ou s’inscrit-elle dans des mobilités résidentielles, des pratiques et des représentations plus ordinaires ? Dans quelle mesure cette forme urbaine participe-t-elle à l’étalement urbain et en quoi pose-t-elle un problème pour la gestion et la gouvernance urbaines ?
2-      La mondialisation du phénomène

- Le réseau de recherche pluridisciplinaire et international sur les gated communities crée par G.Glasze a permis d’appréhender l’étendue du phénomène via quatre grandes manifestations scientifiques en 1999 à Hambourg, en 2002 à Mayence, en 2003 à Glasgow et enfin en 2005 à Pretoria. Celles-ci ont servi à fixer des foyers de forte croissance des enclaves résidentielles : Les Etats- Unis, et l’Amérique latine (Glatsze, Webster et Frantz)[5]. Ainsi, les Etats-Unis représentent un des territoires les plus étudié notamment au travers des espaces de la Sunbelt. Une dizaine de chercheurs, essentiellement européens, ont étudié le sudest (Caroline du sud, Floride, Géorgie, Texas) [J.Chevalier, S.Low][6] et le sud-est (Arizona, Californie) [K.Frantz, T.Frazier, R.Legoix, S.Degoutin][7], permettant une très bonne connaissance des modèles d’enclosure aux Etats-Unis. C’est en effet le territoire de genèse de recherche sur cette thématique avec notamment les travaux de J .Blakely et G.Snyder[8] en 1997, chercheurs qui ont débuté le recensement des enclaves résidentielles et ont ainsi permis de constater le poids de ce processus (20000 gated communities abritant 8 millions d’habitants à la fin des années 90). Leurs travaux et plus tard ceux de nombreux autres chercheurs ont mis à jour les rouages du processus ; En premier lieu le développement d’une gouvernance privée souhaitée par les communautés de résidents. Les gated communities aux Etats-Unis seraient donc la conséquence des ambitions sécessionnistes ou plus généralement d’entre soi des populations américaines. Concernant ensuite la  diffusion spatiale de ces espaces résidentiels, on peut trouver les foyers d’origine dans les régions propices aux « migrations de retraite ou de loisir balnéaires de la Sunbelt »[9]. Nous retrouvons donc ce processus dans des états comme la Californie, la Floride ou le Texas, où l’ambition des populations et même la nécessité résident dans la présence d’un environnement tranquille, sûr et propice au bien-être. Néanmoins, et c’est tout l’intérêt du cas américain, ces enclaves se sont diffusées à tout le pays en se positionnant dans les aires métropolitaines que ce soit en zone périurbaine, mais également, comme l’a exposé Chevalier dans les centres urbains par l’intermédiaire des différentes politiques de rénovation urbaine des centres dégradés. En ce sens, et malgré la présence de foyers très propices au développement de ce modèle d’habitat, la localisation des gated communities reste très ubiquiste et semble marquer au fur et à mesure de son développement, une diversification de ces formes et populations. En effet, en parallèle au principe d’urbanisme affinitaire développé notamment par Ghorra Gobin[10], des chercheurs comme Renaud Le Goix[11] ont invoqué une diversification sociale des populations résidentes avec de plus en plus de gated communities ouvertes aux bas revenus. Ce modèle résidentiel n’est donc plus cristallisé dans une image de cage dorée comme il l’avait été dans les différents articles de la communauté journalistique.

- L’Amérique latine ensuite se présente comme le deuxième grand foyer de localisation des enclaves résidentielles fermées. Développé sur les bases d’une très forte inégalité sociale mais aussi de très forts taux de violence et de criminalité, ce modèle résidentiel connaît un remarquable essor en Colombie, en Argentine et surtout au Brésil (M-F.Prevot-Schapira 1999)[12]. Caractérisés par une fragmentation urbaine inscrite dans les modes d’habiter des populations, ces pays observent une limitation très nette entre espace privatif et espace public. De nombreux chercheurs tels que le pionnier en la matière T.Caldeira[13] ou encore Menna Barretosilva, Becker, Reis ou De Souza e Silva ont montré l’importance de la recherche d’entre soi social des populations brésiliennes génératrices du modèle de fermeture résidentielle. Mais outre la prééminence de ce phénomène au Brésil, nous avons pu constater sa diffusion en Argentine (G.Thuillier)[14], au Mexique (Kanitscheider, Giglia, Guerrien, Scheinbaum)[15], au Pérou (Plöger)[16] ou encore en Colombie (F.Dureau)[17], où le produit immobilier sécurisé situé majoritairement dans les grandes agglomérations se destine de plus en plus aux classes moyennes qui souvent perçoivent ces ensembles sécurisés comme favorisant le processus d’ascension sociale. Porteurs de différentes dénominations : les condominios fechados au Brésil, les barrios cerrados en Equateur, les con juntos cerrados en Colombie ou les country clubes en Argentine, ces modèles résidentiels se banalisent et semblent même se systématiser, témoignant d’un « cloisonnement croissant entre les différentes parties de la ville »[18].

- Outre ces deux pôles de développement et de recherche, des travaux commencent à apparaître concernant les continents européen, africain et asiatique. Néanmoins, le phénomène semble ici limité car peu abordé par la recherche et surtout moins visible en proportion par rapport au processus se déroulant dans les territoires décrits plus haut. L’Afrique tout d’abord, connaît une croissance importante du phénomène surtout dans des zones de cohabitation entre différentes ethnies. Les écarts sociaux, le racisme latent et les faits de violence sont les facteurs favorisant la diffusion d’enclaves résidentielles fermées sur ce continent. L’exemple le plus frappant en la matière est le succès remporté par la fermeture résidentielle en Afrique du Sud. Pérouse De Mont Clos[19] parle de modèle de l’architecture du bunker, tant ces espaces résidentiels sont fortifiés et pourvus en matériaux sécuritaires. Benit[20], Jurgens ou encore Landman ont mis en évidence cette volonté d’entre soi des classes aisées en Afrique du Sud, influencée par un marché immobilier de la fermeture très puissant dans le pays. D’autres pays, toutes proportions gardées, sont touchés par la fermeture comme le Nigéria (Oluseyi)[21], le Ghana (Grant)[22] ou l’Egypte (G.Meyer)[23]. Nous retrouvons ces modèles résidentiels toujours localisés dans des grandes aires urbaines et dans des zones cosmopolites. Les états se montrant souvent impuissants face au développement de ces enclaves, accusent celles-ci de reproduire un schéma de ségrégation raciale et sociale et de faire replonger le pays au temps du colonialisme. Les intellectuels d’Afrique du Sud crient souvent au scandale en prévenant du risque de retour à l’apartheid et aux montées des violences conséquentes aux déséquilibres sociaux et à la fragmentation urbaine.

- L’Asie ensuite, tout comme l’Europe, présente un développement beaucoup plus lent de ce phénomène. Au niveau du continent asiatique, c’est le monde arabe qui admet en plus forte proportion l’implantation de la fermeture. Au Liban notamment, ce sont les différents conflits armés qui ont servi de terreaux fertiles à l’élaboration de ces forteresses résidentielles. C’est donc ici l’insécurité qui a primé dans le développement de la fermeture jusque dans les années 1990[24]. Depuis, tout comme l’Asie du Sud et l’Asie Orientale, le développement de la fermeture résidentielle s’est appuyé sur l’influence notamment du modèle étatsunien et du succès rencontré par celui-ci auprès des populations. On peut donc parler dans ce cas d’un intérêt financier certain de la part des promoteurs immobilier comme facteur de diffusion. Ainsi, la fermeture touche, depuis une vingtaine d’années l’Inde (Dupont)[25], l’Indonésie (Leisch)[26], la Chine (Giroir.G)[27] ou encore l’Australie (Billard, Madoré)[28] de manière encore très limitée dans les zones urbaines à forte concentration en population.

- L’Europe enfin, qui concerne plus directement notre étude, n’a connu que plus tardivement la fermeture résidentielle. Néanmoins, celle-ci semble se développer assez rapidement selon Jaillet[29]. Les principaux foyers sont d’une part la péninsule Ibérique (R.Wehrhahn)[30] et notamment la capitale de l’Espagne Madrid, ainsi que l’Europe orientale (A. Al-Hamarneh)[31] et notamment la ville de Moscou depuis la chute du régime soviétique. Développé à partir des années 1980 pour l’Espagne et le Portugal, 1990 pour les pays de l’est, le modèle de la fermeture s’est installé dans les aires métropolitaines, loin des centres-villes. Ces espaces clos regroupent des populations essentiellement aisées dans les deux cas. Néanmoins, la recherche d’entre soi des populations russes aisées est plus marquée et les nouveaux riches ayant fait fortune après l’éclatement de l’URSS, cherchent à afficher ostentatoirement leurs richesses. L’édification de véritables forteresses ultra sécurisées est donc un moyen pour ces populations de mettre en avant leur ascension sociale, leur réussite fulgurante. Outre la Russie, les chercheurs, dans une moindre mesure, se sont aussi intéressés à la Hongrie (Bodnar)[32], à la Bulgarie ou à la Pologne où les facteurs de développement de la fermeture résidentielle sont souvent très semblables à ceux de la Russie.

3-       Le cas français : répartition ubiquiste et diversification des enclaves résidentielles fermées

- La France a ceci de particulier comparée aux pays anglo-saxons, que traditionnellement, espaces publics et espaces privés sont très nettement délimités par des barrières physiques. C'est pourquoi, la question de la fermeture résidentielle apparaît plus complexe à aborder dans le contexte français. Ancrée dans les valeurs françaises, dans l'habitus, la clôture caractérise en France la force revêtue par le droit de propriété. Au fil du temps, l'enclosure s'est banalisée et ne s'attache donc pas forcément à la volonté d'appropriation de l'espace privé. Néanmoins jusqu'ici, la fermeture s'attachait généralement au pavillonnaire et donc à l'individuel, sans toucher le logement collectif. Ce dernier, fortement développé dans la seconde moitié du XXe siècle via la construction de nombreuses barres d'immeubles, voulait alors offrir une libre circulation aux populations.

- Néanmoins, il faut noter une évolution dans les années 1990 qui implique la fermeture d'espaces résidentiels collectifs. En effet, nous pouvons observer la multiplication des équipements sécuritaires dans les agglomérations françaises. Ainsi, on note le passage des contrôles d'entrée des portes des logements aux portes des bâtiments, déplaçant ainsi plus loin la frontière entre l'habitat et la rue. Ce changement n'est pas anodin et montre la volonté de renforcer toujours plus la frontière entre espaces publics et espaces privés. De ce fait, on clarifie le statut de tel ou tel lieu, et on s'approprie l'ensemble de l'espace résidentiel, que ce soient les parkings, les espaces verts, les aires de jeux, les couloirs... En ce sens, l'habitat ne se limite plus à l'appartement mais à tout immeuble, ses appendices et ceci jusqu'à la limite que représente la voie publique. En mettant en avant ces transformations des espaces résidentiels, nous comprenons que le processus de fermeture est bel et bien présent en France. Dès lors, la complexité s'efface car l'idée du « chez soi » est renforcée, mieux limitée par le filtrage des individus extérieurs. On se retrouve désormais confronté à des cellules de voisinage s'appropriant et partageant le même espace d'habiter limité bien sûr au seuil de l'appartement. C'est donc le terme de communauté qui peut ressortir de ce nouveau modèle résidentiel. Évidemment, il n'est pas question de comparer celui-ci avec le modèle américain de la gated communitiy articulé autour d'une communauté d'habitants soudés car socialement, politiquement ou culturellement en adéquation. Néanmoins, il est évident que l'appropriation d'un plus grand espace et le partage de cet espace privatisé seront symboles d'évolution quant aux pratiques, attentes et représentations des populations résidentes. C'est sur ces changements et sur les questionnements qu’ils soulèvent que les chercheurs ont voulu travailler en traitant des enclaves résidentielles fermées en France. Ici, il est pertinent d'observer l'historique et l'état des savoirs concernant cette thématique. Quand ce phénomène est-il apparu ? Comment a-t-il été abordé ? Quelles sont les modalités de développement de ce processus dans l'hexagone ? Où les fermetures se localisent-elles sur le territoire français ?

- La fermeture résidentielle est récente en France même s'il existe depuis le XIXe siècle quelques espaces résidentiels clos comme les bastides présentes notamment sur la Côte d'Azur. Mais depuis les années 90, de nombreux programmes immobiliers neufs affichent l'avènement de dispositifs sécuritaires dans leur construction. Mais ces recherches entreprises sur le sujet sont encore très restreintes. Ce sont en premier lieu les journalistes qui ont mis au jour le développement du phénomène en comparant bien souvent celui-ci au modèle des gated community afin sans doute de créer la sensation. Cette émulation a débuté dès lors que le journal le Monde en 1999[33] s’est intéressé au sujet. Par la suite, les études entreprises par Hacène Belmessous en 2000[34] pour la revue Urbanisme, ainsi qu'en 2002 pour le journal le Monde[35] sont plus élaborées car celui-ci s'est appuyé sur la description de plusieurs résidences et notamment à Toulouse, afin de démontrer le processus de ségrégation résidentielle dans des villes françaises. Enfin, le journaliste Mathieu en 2001[36], à travers son article « Ghettos pour millionnaires » paru dans le journal le Monde, a décrit la mise en place dans le département du Var d'un véritable ghetto de riches entièrement clos et ultra sécurisé. Or, et c'est bien souvent le cas pour les articles journalistiques, l'analyse s'arrête là. En effet, les terrains d'observations sont tous similaires, choisis selon le caractère aisé de leurs populations ainsi que selon l'arsenal sécuritaire qui les constitue. Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon en 1994 évoquent à ce sujet «l'archétype du lotissement chic »[37]. Le journalisme nous offre donc une vision faussée de la fermeture résidentielle attachée aux principes communautaires et d'entre soi outre-Atlantique et non aux réalités locales. Cependant, leurs travaux nous ont permis de montrer l'importance du phénomène dans les agglomérations du sud de la France. Ainsi, on distingue la ville de Toulouse, véritable pionnière en matière de fermeture résidentielle via le promoteur Monné Decroix qui a progressivement diffusé ce modèle en France. Plus largement, et toujours selon les différents articles, les villes de Bordeaux, Montpellier, et de la Côte d'Azur (Marseille, Nice...) seraient fortement touchées par le phénomène. Or, même si cet ancrage sur le sud de la France n'affiche pas une très grande véracité, et même si aucune étude sérieuse n'a réellement été réalisée par la sphère médiatique, ces articles ont tout de même permis de comprendre l'importance prise par ce phénomène depuis les années 90. Cette approche stéréotypée a cela de positif qu'elle a pu servir d'impulsion aux travaux des différents chercheurs géographes et sociologues confondus. François Madoré[38] en tête, mais aussi quelques autres, ont donc débuté un recensement partiel de la fermeture sur le sol français et ont établi des théories de localisation et de diffusion. Il est essentiel d'expliquer, au vu des travaux réalisés sur le sujet, le succès récent des enclaves résidentielles fermées en France. Cette brève analyse sert d'introduction à une étude plus fine concernant les changements intervenus dans les modes d'habiter.

- Selon Madoré, mais aussi Éric Charmes[39] qui ont traité du cas français, la fermeture résidentielle tiendrait à trois facteurs : L'appropriation des espaces d'habiter, la recherche d'une meilleure qualité environnementale dans l'habitat et d’un meilleur cadre de vie. En premier lieu, la fermeture comme action d'appropriation des espaces d'habiter tient à un discours et des représentations mondialisées ayant attrait à l'insécurité des espaces urbains. L'augmentation de la criminalité croissante depuis les années 50 et la mondialisation de ce phénomène serait un facteur favorisant la banalisation des programmes immobiliers de fermeture résidentielle. Le sentiment d'insécurité lié en grande partie aux représentations est devenu un véritable marché, non seulement pour les médias qui usent et abusent des faits de violence dans leur journal télé ou rédaction, mais aussi pour les promoteurs qui se servent de ces représentations comme argument marketing. François Madoré signale ainsi que « selon l'enquête permanente sur les conditions de vie des ménages de l'INSEE, le sentiment d'insécurité au domicile double lorsque les individus ont été victimes, au cours des deux dernières années précédant l'enquête, soit une agression physique ou verbale, soit d'un cambriolage ». L'auteur ajoute qu'en parallèle de ce sentiment croissant d'insécurité, et participant d'ailleurs de celui-ci, le taux d'élucidation des crimes et délits a quant à lui baissé fortement en passant de 36 % en 1950 à 30 % en 2000. De ce fait, il est logique d'admettre le manque de confiance des populations envers les institutions judiciaires ou policières pour ce qui relève de la protection de leur lieu de vie. Les citoyens selon cette même logique auraient été demandeurs et la fermeture résidentielle afin de prendre en main leur propre sécurité et celle de leur cellule familiale. La scission entre sphère publique et sphère privée devient alors officielle et les régulations de l'insécurité deviennent progressivement informelles pour justement s'inscrire dans cette sphère privée. L'avènement de la prévention situationnelle et de l'espace défendable ont tous deux participé à cette régulation informelle de l'insécurité et ont été les générateurs de nouveaux modes d'habiter et type de bâti. L'appropriation d'un espace plus large d'habiter participe à ce processus de régulation de l'insécurité. Désormais, on ne protège plus seulement son appartement ou sa maison, mais aussi le pas de sa porte, sa cage d'escalier, son parking ou même encore sa rue dans le cas des lotissements fermés. Via ces nouvelles limites, il s'agit d'établir de nouvelles frontières entre la rue et l'habitat et donc entre « l'étranger » et son chez-soi. On limite ainsi toute tentative de larcin, du moins en principe.

4-      Une fermeture mondialisée pour des formes diversifiées

- De par les multiples formes prises par la fermeture résidentielle aux différentes échelles que constituent les territoires, et du fait des enjeux sous-jacents, il est d’intéressant de s’interroger sur les contextes locaux afin d’appréhender les mutations des espaces urbains.

- Le recensement systémique des ensembles résidentiels fermés pour Montpellier et Marrakech dans le cadre des recherches de thèse[40] s’est inséré dans la logique d'une démarche inductive qui a été choisie pour réaliser ces travaux. Partir d'un fait observé pour ensuite en expliquer les causes a justifié le recensement minutieux de tous ces ensembles résidentiels fermés, la description précise de toutes ces entités et leurs cartographies afin de saisir les effets de de territoire sous-tendus par le processus de fermeture. Dans le cas de ces deux grandes agglomérations, seules quelques poches urbaines sont encore préservées de la présence d’entités résidentielles fermées comme notamment les centre-ville historiques (l’Ecusson à Montpellier et la Médina à Marrakech) ou plus globalement les zones les plus densément urbanisées.

- Dans le cas de  la ville de Montpellier, les ensembles résidentiels fermés sont répartis de manière ubiquiste avec une prédominance au Nord et Nord-est, essentiellement les quartiers étudiants, et à l’Est, au sein principalement des nouveaux quartiers d’extension urbaine. L'implantation de ces ensembles résidentiels fermés correspond essentiellement, soit à la proximité immédiate de zone de flux importantes comme les stations de transports multimodales, soit aux zones d’urbanisation récentes et notamment les zones d’aménagement concertées (Lironde, Millénaire, Malbosc, Euromédecine, Croix d’ Argent, Grisettes). De manière moins significative, les quartiers attenants à ces espaces de polarisation, réunissent de nombreux ensembles résidentiels fermés du type habitats collectif notamment par le biais d'un processus d'imitation de copropriétés privées environnantes et fermées post-construction.

- Concernant la répartition des ensembles résidentiels fermés par types de bâti, l’habitat collectif reste majoritaire puisque représentant plus de 90 % de l'ensemble des entités fermées et se trouve disséminé de manière ubiquiste dans l'ensemble des quartiers montpelliérains. Les ensembles d'habitats individuels, le deuxième type de bâti le plus représenté (8%), se localise en périphérie urbaine, soit à proximité des grands flux de circulation, à proximité des quartiers réunissant les populations les plus précaires ou enfin, à proximité de zones d'activités (centres commerciaux, zones industrielles…). Par ailleurs, le processus de fermeture prend de nouvelles orientations à partir des années 2000 en se développant de manière croissante dans les communes périurbaines et en premier lieu au sein des communes les plus proches du pôle urbain et disposant de frontières communes avec la ville centre.

- Dans le cas marocain et plus particulièrement l’agglomération de Marrakech, la fermeture résidentielle s'est orientée vers une clientèle aisée, en résidence principale, mais surtout vers une population de saisonniers, qu'il s'agisse de touristes, mais également de propriétaires de résidences secondaires. S'agissant des lieux privilégiés de l'implantation de cette fermeture, les schémas de développement sont également très différents de ce que l'on retrouve dans les villes françaises dans le contexte d'une croissance urbaine très peu planifiée. En effet, concernant de nombreux ensembles résidentiels fermés, l'implantation relève souvent d’opportunismes fonciers dans une agglomération où les investisseurs étrangers et plus globalement les marchés immobiliers privés sont très puissants. Dans ce contexte, il est possible d’identifier différentes formes prises par le processus de fermeture,  à savoir d’une part le renforcement d'entre soi déjà existants aux sein des anciens quartiers coloniaux (Guéliz et Hivernage) et d'autre part la multiplication, voir la banalisation de ces ensembles résidentiels fermés en périphérie urbaine à travers le développement de superstructures de type gated community, rassemblant principalement des maisons individuelles organisées autour d’espaces de loisir communs (golfs, points d’eau, activités sportives…).

- Globalement, les populations résidantes sont essentiellement représentatives des classes sociales les plus aisées avec une quasi majorité d'occidentaux concernant les ensembles résidentiels des quartiers Est et Nord et une part de plus en plus importante de résidents d'origine marocaine pour les quartiers de Guéliz et d’Hivernage. Concernant les ensembles résidentiels fermés implantés route de Targa et route de Casablanca notamment, les modèles d'habiter et les clients ciblés se sont différenciés des clients fortunés des vastes ensembles de types gated community avec une plus grande mixité du bâti et des populations plus variées socialement allant des catégories moyennes supérieures, aux catégories les plus aisées et rassemblant aussi bien des populations marocaines qu’européennes ; la plupart du temps des actifs occupés travaillant dans la ville centre. Cette répartition spatiale est une caractéristique très forte de la fermeture résidentielle à Marrakech et plus largement dans les villes les  plus cosmopolites du Maroc.
- Concernant les formes de bâti, la fermeture résidentielle est répartie entre le bâti individuel enclos (32 % des ensembles résidentiels fermés pour Marrakech et 53 % pour l’ensemble de l’agglomération) et le bâti collectif enclos, ce dernier constituant le modèle dominant, représenté à plus de 65 %. Cette forte représentation du logement individuel à l’échelle de l’agglomération démontre la volonté d'un entre soi social et affinitaire et l'exigence de prestations de haut standing de la part des touristes mais également des propriétaires de résidences secondaires ou à l'année.  Ces superstructures se sont implantées progressivement depuis la fin des années 90 et de manière très sectorisée dans la ville rouge.
5-       La fermeture résidentielle : quels enjeux pour les territoires?

- L'étude la fermeture résidentielle est pertinente à plusieurs titres. En effet, les changements globaux intervenus ces dernières années nous poussent à nous interroger sur le développement durable des sociétés. La croissance des inégalités sociales, la fragmentation et la progressive perte d'identité urbaine ainsi que le caractère de plus en plus individualiste des individus sont des risques désormais clairement identifiés. Or, la fermeture résidentielle doit être abordée comme un risque potentiel au développement durable des espaces urbains. Il est donc important d'appréhender la conjoncture dans laquelle se développe un tel phénomène en traitant des nouvelles questions sociales et urbaines impliquées par le changement des sociétés humaines. Nous abordons ici les thématiques d'urbanisme affinitaire, de ségrégation sociale, de sécurisation des espaces ou encore de sécession politique.

- Jacques Donzelot[41] parle de l'indispensable « ciment civique » et induit le besoin pour toute société de faire « nation » afin de parer aux risques d'une désolidarisation sociale qui mettrait en péril tel ou tel État. Le géographe traduit bien la difficulté des sociétés à affronter la question de la mondialisation qui remet en cause les systèmes socio-économiques et politiques établis. La globalisation économique a eu pour conséquence la fragmentation des territoires. Les concurrences accrues entre états, régions, localités, ont accentué les inégalités sociales. La division des classes sociales a toujours été un fait de nos sociétés. Néanmoins, nous observons que ces mêmes sociétés semblent perdre leur fonction assimilatrice pour progressivement construire des tendances d'entre soi. Cette fracture sociale et urbaine participe à la création de ces nouvelles cellules d'habitat protectrices que sont les enclaves fermées.

- À l'urbanisme fonctionnel instauré par la ville industrielle a succédé l'urbanisme affinitaire. Celui-ci définit « toutes les formes de production de la ville qui favorise l'agrégation entre des ménages de même rang social, aux goûts et aux modes de vie similaires » (Guenola Capron)[42]. C'est l'idée d'une « ville à la carte » qui serait choisie librement par les individus selon Ascher[43] et où les déterminismes que constituent les proximités spatiales seraient gommés au profit de la capacité de déplacement des individus. Selon Donzelot, les individus préféreraient s'affranchir des relations de voisinage au profit de relations sociales électives et déterritorialisées. C'est enfin sur cette logique que se sont construits certains modèles de ville comme « l'archipel » de Viard[44] qui admet des pratiques reliant différents morceaux de territoires similaires autant socialement que dans leur fonctionnement en délaissant les autres espaces. Ce repli des populations est souvent diagnostiqué par les géographes, les sociologues comme un mal causé par la montée des individualismes ; phénomène qui contribue à la progressive perte d'identité et de sociabilité de la ville. L'espace public se voit dénigré et progressivement happé par l'espace privé. Ici, les contraintes d'habiter imposées par la ville d’hier s'estompe au profit de zones homogènes, d'un voisinage électif, sélectif et par conséquent très excluant. Les déplacements permis par les transports, l'augmentation des niveaux de vie mais aussi les écarts sociaux ont abouti à la capacité toujours plus grande pour les populations de choisir leur espace de vie ainsi que leurs relations de voisinage. Le développement des espaces périurbains et la multiplication des centres névralgiques dans l'urbain ont développé l'autonomie de certains espaces et de leurs populations. L'urbanisme affinitaire réinvente la ville. C'est l'idée d'une ville du choix qui « déterritorialise les rapports sociaux, éloigne les habitants des cadres socio culturels où ils ont grandi, libère les individus de la pression du ou des groupes, leur donne la possibilité de choisir par eux-mêmes un univers relationnel, élargi la possibilité du choix et des perspectives » (G.Dubois-Taine, Y.Chalas)[45].

- Via ce processus, de nombreux constituants traditionnels de la ville disparaissent comme les codes socioéconomiques mais aussi les espaces identitaires comme le quartier dont le sens se perd peu à peu au profit de nouveaux réseaux de sociabilité. Les travaux de Nicole Haumont[46] traitent notamment de ces progressives pertes d'identité et de la destruction de la cohésion sociale dans certains quartiers au profit notamment de réseaux communautaires (Affinités autour d’un loisir, d’une croyance, d’une fonction, d’un style de vie…). Le modèle de la gated community marque l'effondrement des codes du vivre ensemble. Renaud Le Goix[47] a pu dénombrer une multitude de cas issus de ces regroupements affinitaires en Californie en mettant en avant les rapprochements autour d'un culte, d'une catégorie sociale, d'une activité ou d'un idéal commun de sécurité. Ces pratiques fragilisent le « faire société » qui fonde la ville. Il est complexe de présager, en s’attachant à l’émergence de ces processus, de la fin de la ville ou de l'émergence d'un nouveau modèle de ville. L'ambition pour les populations réside-t-elle dans la création de nouvelles villes fidèles à leurs attentes et représentations ? Par la présence de murs ou autres matériaux sécuritaires ou encore via l'éloignement, les strates les plus aisées de la population ont cherché à fuir la ville dans laquelle elles ne trouvaient pas de tranquillité et de proximités de voisinage satisfaisantes. Les écarts de richesse de plus en plus grands et les individualismes renforcés par les processus de mondialisation ont participé à la sectorisation sociale et affinitaire des populations. Pour appréhender ces changements globaux, il faut comprendre tous les processus qui rentrent en compte dans leur développement.

- Or, ces changements sociaux tendent à la production d'un risque de plus en plus marqué à l'échelle mondiale : celui de la sécession. Cette nouvelle logique de séparatisme des composantes sociales de la ville met en péril toute cohésion des sociétés. Le principe d'évitement d'une population au profit d’une autre est un principe qui se banalise pour notamment affirmer sa condition sociale. André Bruston[48] définit par le terme sécession le fait de se retirer à une distance perceptible pour faire sentir, par le poids de son absence, le refus d'une situation donnée. Cette définition implique le mécontentement d'individus face à une société qu'ils désapprouvent mais dont ils ne s'excluent pas forcément. Cette sécession peut d'ailleurs intervenir au sein de différentes catégories sociales de la population. Ainsi, les violences urbaines sont une forme de sécession, exprimant le rejet d'une société méprisant souvent les catégories les plus pauvres, les excluant. À l'opposé, la sécession peut également englober les classes de populations aisées, rejetant justement cette violence urbaine et les classes les plus pauvres en se repliant spatialement. Jusqu'ici, la France et plus largement l'Europe ont su se soustraire aux mouvements sécessionnistes par un attachement commun à la notion de démocratie, de vivre ensemble qui faisait de la cohabitation, de la mixité, une force pour les états concernés. La spécialisation des lieux est une des conséquences envisagées par Sasskia Sassen[49] lorsqu'il traite de l'existence d'une ville « duale ». Polarisation sociale et inégalité d'attraction des lieux pour conséquence le développement des écarts socio-spatiaux.

- L'un des risques très présent dans les espaces urbains reste aujourd'hui encore l'étalement urbain qui est d'ailleurs très profitable à l'établissement des enclaves résidentielles qui s'étendent sur de grands espaces que l'on ne retrouve pas dans des zones densément urbanisées. Cet étalement urbain se définit par des espaces d'excroissance de la ville loin du centre historique et urbanisés de manière discontinue, donc peu favorable aux grands principes de la ville durable. Développé sous la forme du modèle pavillonnaire à partir des années 70 en France, il renforce la spécialisation des lieux en abritant globalement les classes moyennes. Ces zones d'étalement urbain sont des lieux privilégiés d'installation des ensembles résidentiels fermés car la promesse par les promoteurs d'un cadre de vie agréable et loin de la densité urbaine de la ville centre tout en étant protégés par les équipements sécuritaires reste un très bon argumentaire marketing. L'implantation de nombreuses gated communities dans les zones d'étalement urbain aux États-Unis présage l'établissement croissant de lotissements clos en France, certains promoteurs commençant à importer ce modèle.

- Mais l'établissement des enclaves en périphérie de la ville atteste d'un autre processus issu des grands changements des modèles de ville : l'apparition de nouvelles centralités. Via celles-ci, les exurbanisés peuvent profiter de tous les équipements et services nécessaires en s'exilant néanmoins de la ville centre. Ce processus rentre d'ailleurs dans l'argumentaire de vente des promoteurs immobiliers. Les populations pourront donc profiter de tous les bons côtés de la ville en oubliant les mauvais. La multiplication des centralités entre donc dans un processus de fragmentation qui constitue un des périls urbains. Cette recomposition de la centralité peut également s'inscrire dans les mouvements de sécession des populations en promouvant une société choisie et non pas subie. Désormais, la possibilité de choisir son lieu de résidence et l'étalement urbain conséquent ont changé la donne. L'entre soi et plus précisément la désolidarisation des sociétés d'aujourd'hui s'inscrivent alors dans le concept de sécession. Cette fuite des populations vers un espace choisi dont profite largement le modèle de la fermeture résidentielle représente un enjeu majeur car un risque pour la ville. Le risque de la perte de cohésion sociale, de lien entre les individus, donc la perte de l'identité urbaine. La ville durable telle qu’elle est envisagée devrait permettre un équilibre social, économique et environnemental. Or, la fragmentation, la spécialisation des espaces, la multiplication des centres ainsi que les individualismes ne sont pas envisageables à long terme si l'on souhaite le développement durable de la ville. Bien entendu, la fermeture résidentielle n'est que l'une des facettes de cette fragmentation et cette sécession aspirée par les populations ; mais ce processus en pleine expansion semble crucial puisqu'affichant les dérives parfois extrêmes de sociétés dans leur recherche d'entre soi. En ce sens, ce sujet s'inscrit pleinement dans les préoccupations attenantes à la ville durable en considérant la fermeture résidentielle comme un risque potentiel.

6-       Conclusion

- La fermeture résidentielle est un processus en plein développement. Conséquence directe du renforcement de la mondialisation et des dynamiques de métropolisation, ce phénomène s’est implanté sur l’ensemble du globe en se diversifiant et en s’adaptant aux différents contextes locaux. Souvent appréhendée comme une des manifestations du processus de fragmentation urbaine, voire comme un risque de sécession dans le cas du modèle de la gated community étatsunien, la fermeture résidentielle rentre pleinement dans les thématiques et les enjeux de la ville durable.

- Révélatrice d’une nouvelle mutation des espaces urbains, cette forme d’habiter particulière marque également la volonté toujours plus forte des populations de privilégier les entre soi. Cette ville à la carte, cette idée du voisinage choisi et non subi, a donné lieu au concept d’urbanisme affinitaire. Via ce concept, les acteurs de l’urbain ont envisagé la fermeture résidentielle comme un risque de fragmentation spatiale, de désolidarisation du ciment social ; en conclusion un espace ayant perdu toute référence globale : une ville éclatée. Les différentes études sur le sujet, ainsi que les nombreux questionnements qui ont découlé de ces travaux, nous ont montré toute la complexité d’un phénomène tel que la fermeture résidentielle. Développé en premier lieu dans les pays anglo-saxons, puis diffusé à l’Asie ou l’Afrique, ce phénomène a pu trouver un cadre d’installation favorable en Europe et notamment en France où les résidences sécurisées se sont implantées à partir des années 90. Principalement localisés dans le sud de la France, les ensembles résidentiels fermés sont au centre des débats politiques et médiatiques et ont progressivement infiltré le champ de la recherche en sciences sociales.

- Il est crucial d’appréhender ce phénomène comme une manifestation des changements économiques, politiques, sociaux, culturels et urbains renvoyant certes à des changements globaux, mais qui s’inscrivent d’une manière bien spécifique dans les contextes sociétaux et les territoires locaux. Cette approche apparaît novatrice concernant l’étude de la fermeture résidentielle car l’objectif ultime est de faire ressortir l’ensemble des formes prises par les enclaves résidentielles fermées en évitant les écueils que constituent les renvois systématiques au modèle de la gated communities et au principe de recherche d’entre soi des populations résidentes donc en évitant toute généralisation d’un processus. Il convient d’analyser la fermeture résidentielle en mettant en avant les effets de territoire via l’analyse des logiques de diffusion ainsi que via l’appréhension de la médiatisation y étant associée pour ensuite traiter de la variation des formes et des niveaux de fermeture résidentielle que l’on pourra retrouver. Le recensement minutieux des localisations de ces ensembles résidentiels fermés et l’analyse approfondie des logiques de développement du phénomène permettra de capter les différentes recompositions urbaines, la diversité des trajectoires et mobilités résidentielles des habitants, leurs statuts via l’appréhension de leurs différents niveaux socio-économiques ou encore les pratiques, représentations ou attentes suscitées par ces nouveaux espaces de vie.

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